Nouveau polycotylidé : Scalamagnus

En 2003, un squelette presque complet (MNA V10046) de polycotylidé fut découvert dans le Turonien de la formation géologique de Tropic Shale (Utah, Etats-Unis). En 2008, Schmeisser annonça en conférence sa découverte. En 2009, Schmeisser et Gillette le référèrent à Dolichorhynchops sp. et en décrivirent les gastrolithes. En 2012, Schmeisser McKean décrivit en détail MNA V10046 et en fit l’holotype d’une nouvelle de Dolichorhynchops, baptisée D. tropicensis. Schmeisser McKean référa un second squelette (MNA V9431) découvert en 2000 dans la même formation géologique. D. tropicensis était alors attribué à Dolichorhynchops sur la base de cinq traits crâniens.

Plan du site de la découverte de l’holotype (MNA V10046) de Scalamagnus tropicensis, avec en noir les gastrolithes découverts

Des découvertes plus récentes ainsi que de nouvelles études mirent en évidence le fait que les traits unissant D. tropicensis à Dolichorhynchops étaient en réalité répandus au sein de Polycotylinae. Les analyses phylogénétiques les plus récentes retrouvèrent « D. » tropicensis hors du genre Dolichorhynchops. Lors de la description du nouveau genre Unktaheela (voir cet article), Clark et ses collègues donnent ainsi son propre genre à « D. » tropicensis, car il représente sans aucun doute un genre distinct de Dolichorhynchops. Ils le baptisent Scalamagnus (« grand escalier », en l’honneur du Monument National Grand Staircase-Escalante), avec la nouvelle combinaison Scalamagnus tropicensis.

Photographie du crâne de l’holotype (MNA V10046) de Scalamagnus tropicensis

L’holotype (MNA V10046) de Scalamagnus tropicensis est un squelette presque complet composé du crâne, de vertèbres cervicales, dorsales, sacrales et caudales, de côtes, des ceintures pectorale et pelvienne partielles ainsi que des membres partiels. Il a été interprété à l’origine comme un jeune subadulte, mais Clark et ses collègues considèrent ce spécimen comme un individu adulte. Le spécimen référé à Scalamagnus tropicensis est un squelette postcrânien partiel (MNA V9431) composé de vertèbres, de côtes, des ceintures pectorale et pelvienne partielles et de fragments. Ses dimensions sont presque identiques à celles de l’holotype, ce qui suggère que MNA V9431 est également un individu adulte.

Photographies de plusieurs éléments postcrâniens de l’holotype (MNA V10046) de Scalamagnus tropicensis

L’holotype (MNA V10046) de S. tropicensis a été découvert avec 289 gastrolithes et une dent de requin associés. La dent de requin appartient au genre Scapanorhynchus selon Albright et ses collègues, qui supposent que la carcasse de MNA V10046 a servi de repas à des Scapanorhynchus charognards. De plus, MNA V10046 présente des pathologies avec deux disques intervertébraux rompus et une protubérance sur le coracoïde. Cela suggère que ce spécimen a subi une ou plusieurs blessures graves au niveau de sa colonne vertébrale et une infection au niveau de la scapula, mais aucune étude n’a analysé plus en détail ces pathologies.

Photographie de l’un des coracoïdes de l’holotype (MNA V10046) de Scalamagnus tropicensis, qui présente une protubérance pathologique (flèche noire)

Les gastrolithes retrouvés dans l’holotype sont un des rares exemples de lithophagie au sein des polycotylidés. La taille et la morphologie des gastrolithes de MNA V10046 indique qu’ils proviennent de cours d’eau. Cette tendance à ingérer des pierres se retrouve beaucoup plus fréquemment chez les elasmosauridés. Elle a pu avoir été accidentelle lors de l’alimentation ou volontaire pour améliorer la flottabilité ou aider lors de la digestion. Il n’existe encore aucune certitude à ce sujet, il est d’ailleurs possible que plusieurs hypothèses puissent être combinées, et la question reste en suspens pour le cas de Scalamagnus.

Photographie des gastrolithes découverts avec l’holotype (MNA V10046) de Scalamagnus tropicensis

L’analyse phylogénétique de Clark et ses collègues a classé « Dolichorhynchops » tropicensis hors du genre Dolichorhynchops, dans une position de polycotylidé polycotyliné taxon-soeur du clade composé de Trinacomerum et de Dolichorhynchia. Par conséquent, « D. » tropicensis a reçu son propre genre : Scalamagnus. Scalamagnus est donc un polycotyliné proche du nouveau clade Dolichorhynchia.

Résultats de l’analyse phylogénétique de Clark et ses collègues, classant Scalamagnus (= « Dolichorhynchops » tropicensis) comme un polycotylidé polycotyliné hors du genre Dolichorhynchops

Scalamagnus était un polycotylidé de taille moyenne, mesurant environ 3,2 mètres de longueur. Il avait une morphologie typique d’un polycotyliné, avec des dents coniques et effilées, un museau modérément allongé ainsi qu’un corps hydrodynamique et manœuvrable propulsé par ses nageoires. Scalamagnus vivait dans des eaux tempérées à chaudes, en compagnie de tortues, du pliosauridé Brachauchenius, du mosasauridé Sarabosaurus et des polycotylidés Trinacomerum, Palmulasaurus et Eopolycotylus.

Références : Clark, R.O.; O’Keefe, F.R.; Slack, S.E., 2023, A new genus of small polycotylid plesiosaur from the Upper Cretaceous of the Western Interior Seaway and a clarification of the genus Dolichorhynchops. Cretaceous Research. 105812.

Schmeisser, R.L., 2008, A new species of polycotylid plesiosaur from the early Turonian of Utah: extending the stratigraphic range of North American Dolichorhynchops. Journal of Vertebrate Paleontology. 28: 137A.

Schmeisser, R.L.; Gillette, D.D., 2009, Unusual occurrence of gastroliths in a polycotylid plesiosaur from the Upper Cretaceous Tropic Shale, southern Utah. PALAIOS. 24(7): 453–459.

Schmeisser McKean, R.L., 2012, A new species of polycotylid plesiosaur (Reptilia: Sauropterygia) from the Lower Turonian of Utah: Extending the stratigraphic range of Dolichorhynchops. Cretaceous Research. 34: 184-199.

Albright, L.B.; Gillette, D.D.; Titus, A.L., 2013, Fossil vertebrates from the tropic shale (Upper cretaceous), southern Utah. In: At the top of the Grand Staircase: the Late Cretaceous of Southern Utah. Indiana University Press, Bloomington and Indianapolis. 536-562.

Toutes les images proviennent de Clark et al., 2023, à l’exception de la première et de la cinquième qui proviennent de Schmeisser et Gillette, 2009 ainsi que de la troisième et de la quatrième qui proviennent de Schmeisser McKean, 2012

Un avis sur « Nouveau polycotylidé : Scalamagnus »

Laisser un commentaire