Les pathologies observables sur les os fossiles sont de bons moyens de connaître le comportement de leurs propriétaires. Leur analyse permet de déceler des indices de combats intraspécifiques, de prédation… Tarchia est un genre d’ankylosauridé connu du crétacé supérieur de Mongolie, représenté par trois espèces différentes. Tumanova et ses collègues décrivent ainsi les pathologies affectant un spécimen de l’espèce Tarchia teresae.
Tumanova et ses collègues ont étudié le crâne du squelette partiel PIN 3142/250, découvert dans le Maastrichtien de la formation géologique de Nemegt (Ömnögovi, Mongolie). PIN 3142/250 a été initialement référé à la nouvelle espèce Tarchia gigantea par Tumanova en 1977. Arbour et ses collègues ont préféré attribuer PIN 3142/250 à Saichania. Finalement, en 2016, Penkalski et Tumanova en ont conclu que PIN 3142/250 représentait bien un spécimen de Tarchia, mais attribuable à sa propre espèce, qu’ils ont nommé T. teresae. Tumanova et ses collègues ont passé le crâne de PIN 3142/250 au scanner CT, afin d’en obtenir des images de sa morphologie interne.
Tumanova et ses collègues remarquent la présence de petites lésions sur plusieurs zones du crâne, sous forme de perforations. Le scan CT de PIN 3142/250 leur a également permis de déceler plusieurs preuves de pathologies internes. Tumanova et ses collègues ont observé une masse hétérogène et hyperdense, remplissant partiellement la cavité entre la narine interne et l’orbite droite. Ils ont également remarqué plus d’une douzaine de nodules minéralisés présents dans les cavités respiratoires, partageant les mêmes caractéristiques que la masse hétérogène et hyperdense.
Tumanova et ses collègues proposent deux origines possibles pour les lésions présentes sur la surface externe du crâne. Elles sont liées à un traumatisme causé soit par une morsure du tyrannosauridé Tarbosaurus, soit par des blessures survenues au cours d’un combat intraspécifique. L’armure de Tarchia a pu l’aider à survivre à l’attaque initiale, mais des micro-organismes pathogènes se sont ensuite introduits par les blessures. Ces micro-organismes ont alors pénétré l’os, causant une sinusite infectieuse. Cette sinusite a entraîné une réaction immunitaire de l’organisme, visibles sur le scan du crâne de PIN 3142/250.
La masse hétérogène et hyperdense correspond à une ostéoprolifération osseuse réactive (c’est-à-dire une formation de tissu osseux supplémentaire). L’ostéoprolifération s’est déclenchée pour cicatriser ou bien pour répondre à un processus infectieux ou inflammatoire. Les nodules minéralisées sont probablement des calcifications de débris inflammatoires inspirés ou des nids d’agents infectieux. Les lésions internes du crâne de PIN 3142/250 ont donc été causées par l’infection de la blessure externe par des micro-organismes. Ces lésions étaient probablement chroniques, persistant pendant des semaines, voire des mois, et auraient pu s’avérer fatales. Tumanova et ses collègues ne sont pas certains que ces lésions sont responsables de la mort de PIN 3142/250, mais il est certain qu’elles ont limité ses capacités de respiration et de nutrition.
Références : Tumanova, T.; Penkalski, P.; Gallagher, W.B.; Engiles, J.B.; Dodson, P., 2023, A potentially fatal cranial pathology in a specimen of Tarchia. The Anatomical Record.
Tumanova, T., 1977, New data on the ankylosaur Tarchia gigantea. Paleontological Zhurnal. 4: 92–100.
Arbour, V.M.; Currie, P.J.; Badamgarav, D., 2014, The ankylosaurid dinosaurs of the Upper Cretaceous Baruungoyot and Nemegt formations of Mongolia. Zoological Journal of the Linnean Society. 172: 631–652.
Penkalski, P.; Tumanova, T. ,2017, The cranial morphology and taxonomic status of Tarchia (Dinosauria: Ankylosauridae) from the Upper Cretaceous of Mongolia. Cretaceous Research. 70: 117–127.
Toutes les images proviennent de Tumanova et al., 2023
Dinozoïque : Tratayenia et ses compères 