Redescription de Nichollsemys

Nichollsemys est un genre de tortue cryptodire pan-chelonioidé décrite en 2006 par Brinkman et ses collègues, avec N. baieri pour espèce. Ce genre est connu de quatre crânes plus ou moins complets découverts dans le Campanien de la formation géologique de Bearpaw (Alberta, Canada). Nichollsemys est l’un des rares pan-chelonioidé dont le crâne est très bien connu, mais n’a pas souvent été inclus dans les analyses phylogénétiques. Menon et ses collègues procèdent ainsi à la redescription détaillée de Nichollsemys.

Photographies de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri

L’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri est un crâne presque complet, préservé en trois dimensions. Menon et ses collègues notent que l’un des crânes référés à N. baieri (TMP 2000.55.1) par Brinkman et al. (2006) semble représenter un nouveau taxon distinct. Cela rend douteuse l’attribution des deux autres crânes référés. Par conséquent, Menon et ses collègues basent la redescription de Nichollsemys uniquement sur l’holotype. Pour ce faire, ils ont notamment effectué un scan CT de TMP 1997.99.1.

Dessins interprétatifs de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri

Le scan CT de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri a permis de reconstruire son oreille interne. Celle-ci est similaire à celle des autres tortues marines et ne présente pas de particularités notables. Toutefois, Menon et ses collègues ont mis en évidence la présence de tissus mous probables dans l’oreille interne. En effet, il semble qu’une partie du labyrinthe membraneux soit conservé. Il apparaît sur le scan CT sous la forme d’un halo sombre à l’intérieur de certaines parties de la cavité du labyrinthe endosseux.

Scan CT de l’oreille interne de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri ; les tissus mous sont mis en évidence par l’astérisque en E

En plus des tissus mous de l’oreille interne, Menon et ses collègues supposent également la présence de tissus mous dans la boîte crânienne de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri. Ces tissus se présentent sous la forme d’un système de structures qui passe dans les canaux osseux des artères carotides internes. Pour Menon et ses collègues, une partie des artères carotides aurait ainsi été fossilisée chez TMP 1997.99.1. Ils invitent toutefois à la prudence car il peut également s’agir de terriers fossiles laissés par le passage d’invertébrés charognards suivant le trajet des carotides.

Scan CT de la boîte crânienne de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri ; les tissus mous des carotides sont marqués en rouge

Le scan CT de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri a permis à Menon et ses collègues de noter la présence de nombreux caractères mal identifiés ou non reconnus par Brinkman et al. (2006). Il en résulte que le diagnostic et la position phylogénétique de Nichollsemys ont pu être révisés. L’analyse phylogénétique de Menon et ses collègues classe Nichollsemys comme un pan-chelonioidé basal plus dérivé que Toxochelys mais plus basal que Protostegidae.

Résultats de l’analyse phylogénétique de Menon et ses collègues, qui classe Nichollsemys comme un pan-chelonioidé basal plus dérivé que Toxochelys mais plus basal que Protostegidae

Grâce à sa nature complète, le crâne holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri a pu être inclus dans une analyse morphométrique particulière par Menon et ses collègues. Cette analyse morphométrique compare les morphologies crâniennes des tortues afin de déterminer la présence ou non d’une rétraction du cou. Les résultats de cette analyse montrent que le crâne de Nichollsemys avait une morphologie adaptée pour se rétracter dans la carapace. Ils montrent également que les premiers Pan-Chelonioidea ont eux aussi pu rétracter leur tête dans leur carapace, mais avec un degré de confiance plus fragile.

Résultats de l’analyse morphométrique de Menon et ses collègues, montrant que le crâne de Nichollsemys avait une morphologie adaptée pour se rétracter dans la carapace

Au niveau de l’écologie alimentaire de Nichollsemys, Menon et ses collègues montrent que la biomécanique de son crâne diffère des pan-chelonoidés dérivés et se rapproche de celle de Toxochelys. Nichollsemys ne possède pas de dentaire robuste ni des attaches musculaires très développées sur les mâchoires. Il en résulte que sa force de morsure était plus faible que les pan-chelonoidés dérivés. Menon et ses collègues supposent ainsi que Nichollsemys se nourrissait de proies plus molles, comme des méduses, des céphalopodes sans coquille ou encore des petits poissons.

Scan CT de la mandibule de l’holotype (TMP 1997.99.1) de Nichollsemys baieri

Références : Menon, J.C.L.; Brinkman, D.B.; Hermanson, G.; Joyce, W.G.; Evers, S.W., 2024, New insights into the early morphological evolution of sea turtles by re-investigation of Nichollsemys baieri, a three-dimensionally preserved fossil stem chelonioid from the Campanian of Alberta, Canada. Swiss Journal of Palaeontology. 143: 27.

Brinkman, D.; Hart, M.; Jamniczky, H.; Colbert, M., 2006, Nichollsemys baieri gen. et sp. nov, a primitive chelonioid turtle from the late Campanian of North America. Paludicola. 5(4): 111-124.

Toutes les images proviennent de Menon et al., 2024

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