Nouveau cératopsien : Lokiceratops

En 2019, Mark Eatman découvrit le squelette partiel d’un cératopsien dans la carrière de Loki, dans le Campanien de la formation géologique de Judith River (Montana, Etats-Unis). Ce spécimen fut ensuite excavé puis préparé en 2022, ce qui a permis la réalisation de plusieurs moulages de son crâne. Loewen et ses collègues décrivent ainsi ce squelette comme l’holotype d’un nouveau taxon qu’ils baptisent Lokiceratops (en référence à la localité-type), avec L. rangiformis pour espèce.

Photographies de plusieurs éléments de l’holotype (EMK 0012) de Lokiceratops rangiformis ; on note que le crâne a été en partie reconstitué (les parties artificielles sont en gris)

L’holotype (EMK 0012) de Lokiceratops rangiformis est un squelette partiel composé du crâne assez complet, d’une vertèbre cervicale, du sacrum, de 3 vertèbres caudales, d’un chevron, de la scapula droite, du coracoïde droit et des ischiums. Loewen et ses collègues notent que EMK 0012 est un individu adulte.

Reconstitution squelettique de Lokiceratops, avec les éléments connus de l’holotype en orange
Reconstitution squelettique du crâne de Lokiceratops, avec les éléments manquants de l’holotype en orange

Loewen et ses collègues remarquent la présence de quelques pathologies sur le crâne de EMK 0012, avec des creusements de l’os au niveau de l’épipariétal 7 gauche et des deux squamosaux. Ils n’expliquent pas l’origine de ces pathologies, mais il peut s’agir de réactions osseuses suites à des infections potentiellement dues à des blessures.

Photographies du squamosal gauche (A) et du squamosal droit (B-C) de l’holotype (EMK 0012) de Lokiceratops rangiformis ; on note les creusements pathologiques (notés pa)

L’analyse phylogénétique de Loewen et ses collègues classe Lokiceratops comme un centrosauriné, dans un clade avec Medusaceratops et Albertaceratops. Ils baptisent ce clade Albertaceratopsini. Albertaceratopsini est une tribu de centrosaurinés plus dérivés que Nasutoceratopsini, formant le clade soeur de (Wendiceratops + Sinoceratops) + Eucentrosaura. Loewen et ses collègues notent que les Albertaceratopsini sont endémiques du nord de Laramidia.

Résultats de l’analyse phylogénétique de Loewen et ses collègues, qui classe Lokiceratops comme un centrosauriné (1), dans un clade avec Medusaceratops et Albertaceratops qu’ils baptisent Albertaceratopsini (3)

Lokiceratops se distingue principalement par son ornementation crânienne composée de deux cornes postorbitales et d’une collerette avec de nombreux épipariétaux et épisquamosaux. Lokiceratops se distingue d’Albertaceratops par l’absence de corne nasale. Les épipariétaux les plus grands de Lokiceratops sont les épipariétaux 2, comme chez Medusaceratops, et ont une forme recourbée extérieurement. Les épipariétaux 1 forment une pointe vers le haut tandis que les autres épipariétaux et épisquamosaux sont plus petits.

Dessin reconstituant le crâne de Lokiceratops ; on note l’absence de corne nasale et la forme caractéristique et asymétrique des épipariétaux 1 et 2 sur la collerette osseuse

La collerette osseuse de Lokiceratops est également asymétrique, comme chez de nombreux autres cératopsiens, mais aussi chez les bois des rennes actuels. Loewen et ses collègues ne peuvent déterminer si cette asymétrie est caractéristique, sujette à une variation intraspécifique ou ontogénique, ou encore si elle est liée à une anomalie de développement.

Photographie de la collerette osseuse de l’holotype (EMK 0012) de Lokiceratops rangiformis ; on note la forme caractéristique et asymétrique des épipariétaux 1 (ep1) et 2 (ep2) alors que les autres épipariétaux (ep) et épisquamosaux (es) sont plus petits

Comme chez les autres cératopsiens, les ornements crâniens de Lokiceratops ont probablement joué un rôle dans la communication intraspécifique, notamment pour la sélection sexuelle. Loewen et ses collègues avancent que la sélection sexuelle a pu être l’une des raisons majeures de la très grande diversité de centrosaurinés en Amérique du Nord en seulement quelques millions d’années. Elle a pu se combiner à une partition de niche écologique ainsi qu’à des variations du climat et des environnements.

Arbre phylogénétique de Centrosaurinae montrant l’évolution de l’ornementation de la collerette osseuse ; on note l’ornementation très similaire entre Medusaceratops et Lokiceratops

Lokiceratops était un grand centrosauriné qui mesurait 6 mètres de longueur, avec un crâne mesurant à lui seul 2 mètres. Il vivait dans un environnement de plaines inondables, en compagnie de tortues, de choristodères, de crocodylomorphes, de squamates, de nombreux autres cératopsiens, du pachycephalosaure Stegoceras, des hadrosauridés Probrachylophosaurus, Brachylophosaurus et Corythosaurus, des ankylosaures Zuul et Edmontonia, de troodontidés, des tyrannosauridés Daspletosaurus et Gorgosaurus, des dromaeosauridés Saurornitholestes et Dromaeosaurus et d’oiseaux.

Reconstitution du vivant de Lokiceratops

Référence : Loewen, M.A.; Sertich, J.J.W.; Sampson, S.; O’Connor, J.K.; Carpenter, S.; Sisson, B.; Øhlenschlæger, A.; Farke, A.A.; Makovicky, P.J.; Longrich, N.; Evans, D.C., 2024, Lokiceratops rangiformis gen. et sp. nov. (Ceratopsidae: Centrosaurinae) from the Campanian Judith River Formation of Montana reveals rapid regional radiations and extreme endemism within centrosaurine dinosaurs. PeerJ. 12: e17224.

Toutes les images proviennent de Loewen et al., 2024

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