En 1938, von Huene décrivit le genre Prestosuchus avec deux espèces : P. chiniquensis (l’espèce-type) et P. loricatus. Alors que P. chiniquensis est représenté par plusieurs spécimens relativement complets, P. loricatus se base sur un squelette fragmentaire (SNSB BSP AS XXV 13-24/26-27/43-48) découvert dans le Ladinien-Carnien de la formation géologique de Santa Maria (Rio Grande do Sul, Brésil). En 1942, von Huene référa un calcanéum (SNSB BSPG XXV 25) et des vertèbres dorsales (SNSB BSPG AS XXV 4, 42) à P. loricatus, en provenance de la même formation géologique.
De par sa nature fragmentaire, Prestosuchus loricatus a longtemps été ignoré par les études scientifiques. En 1976, Krebs considéra P. loricatus comme un synonyme junior de P. chiniquensis, ce qui fut accepté par les études suivantes. En 2002, Kischlat a déclaré que P. loricatus était un taxon différent de Prestosuchus, composé de restes d’au moins deux taxons. Il a désigné le calcanéum de son lectotype sous le nom de Karamuru vorax et trois vertèbres de son lectotype sous le nom d’Abaporu loricatus. Toutefois, les noms de Karamuru et Abaporu ont mal été donnés, et il s’agit de deux nomen nudum.
En 2020, Desojo et ses collègues ont également suggéré la possibilité que Prestosuchus loricatus appartienne à un genre distinct de Prestosuchus. Ils ont déclaré qu’une étude de son lectotype et de son paralectotype (le calcanéum et les vertèbres référées par von Huene en 1942, qui ne sont pas un paralectotype mais bien des spécimens référés) était nécessaire. Desojo et Rauhut redécrivent ainsi P. loricatus comme appartenant à son propre genre, qu’ils baptisent Schultzsuchus (en l’honneur du paléontologue brésilien Cesar Schultz), avec S. loricatus comme nouvelle combinaison.
Le lectotype (SNSB BSP AS XXV 13-24/26-27/43-48) de Schultzsuchus loricatus est un squelette partiel composé d’une dent partielle, de quatre arcs neuraux cervicaux, de cinq arc neuraux caudaux, d’une épine neurale caudale, de deux côtes cervicales, de deux côtes dorsales, des ischiums, du calcanéum droit, du métatarsien III droit partiel et de sept ostéodermes.

Desojo et Rauhut notent que les vertèbres dorsales SNSB BSPG AS XXV 4 et SNSB BSPG AS XXV 42 ainsi que le calcanéum droit SNSB BSPG XXV 25 référés à P. loricatus par von Huene ne peuvent pas être référés à Schultzsuchus loricatus. Ces éléments manquent de caractères diagnostiques pour permettre une attribution taxonomique précise, et proviennent d’une localité différente du lectotype. Desojo et Rauhut remarquent également qu’un supposé tibia de théropode et une vertèbre cervicale de Spondylosoma mentionnés par von Huene en 1942 pourraient appartenir au lectotype de S. loricatus. Toutefois, leur analyse détaillée est nécessaire pour s’en assurer.
L’analyse phylogénétique de Desojo et Rauhut classe Spondylosoma comme un membre basal de Poposauroidea. Ce résultat le positionne loin de Prestosuchus, qui est un Loricata non-crocodylomorphe. Desojo et Rauhut classent également les genres Mandasuchus et Mambawakale comme des Poposauroidea basaux, alors qu’ils étaient jusque là classés comme des Loricata basaux. Le classement de Schultzsuchus, Mandasuchus et Mambawakale reste instable, et de nouvelles découvertes pourraient les replacer à la base de Loricata.

Schultzsuchus était un prédateur de grande taille aux vertèbres cervicales assez allongées lui conférant un long cou, comme les autres membres de Poposauroidea. Il aurait vécu dans un environnement de plaines inondables boisées. Schultzsuchus vivait en compagnie de nombreux cynodontes, de procolophonoidés, du rhynchosaure Brasinorhynchus, des erpetosuchidés Pagosvenator et Archaeopelta, des Loricata Decuriasuchus et Prestosuchus, du pseudosuchien Procerosuchus, du proterochampsien Pinheirochampsa, du silesauridé Gamatavus et de l’aphanosaurien Spondylosoma.
Références : Desojo, J.B.; Rauhut, O.W.M., 2024, Reassessment of the enigmatic “Prestosuchus” loricatus (Archosauria: Pseudosuchia) from the Middle-Late Triassic of southern Brazil. The Anatomical Record.
von Huene, F., 1938, Die fossilen Reptilien des südamerikanischen Gondwanalandes. Ergebnisse der Sauriergrabungen in Südbrasilien 1928/29. Neues Jahrbuch für Mineralogie, Geologie Und Paläontologie. 1938(3): 142-151.
von Huene, F., 1942, Die fossilen Reptilien des südamerikanischen Gondwanalandes. C.H. Beck’sche Verlagsbuchhandlung, München.
Krebs, B., 1976, Pseudosuchia. In: Kuhn, O. (Ed.), Handbuch der Paläoherpetologie. Teil 13: Thecodontia (pp. 40–98). Gustav-Fischer-Verlag, München.
Kischlat, E.-E., 2002, Tecodôncios: A Aurora dos Arcossáurios no Triássico. In: Holz, M.; De Ros, L.F. (Eds.), Paleontologia do Rio Grande do Sul (pp. 246–272). Universidade Federal do Rio Grande do Sul.
Desojo, J.B.; von Baczko, M.B.; Rauhut, O.W.M., 2020, Anatomy, taxonomy and phylogenetic relationships of Prestosuchus chiniquensis (Archosauria: Pseudosuchia) from the original collection of von Huene, Middle-Late Triassic of southern Brazil. Palaeontologia Electronica. 23: a04.
Toutes les images proviennent de Desojo et Rauhut, 2024