Proterochampsa est un genre d’archosauromorphe proterochampsien proterochampsidé connu de deux espèces : P. barrionuevoi (l’espèce-type) et P. nodosa. P. barrionuevoi est connu du Carnien de la formation géologique d’Ischigualasto (San Juan, Argentine) tandis que P. nodosa est du Carnien de la formation géologique de Santa Maria (Rio Grande do Sul, Brésil). Proterochampsa est un prédateur semi-aquatique mesurant 3 à 4 mètres de longueur, dont l’écologie alimentaire reste largement spéculative. de Simão-Oliveira et ses collègues étudient ainsi la biomécanique du crâne de Proterochampsa afin d’en déduire son écologie alimentaire.

de Simão-Oliveira et ses collègues ont analysé le crâne holotype (MCP 1694 PV) de Proterochampsa nodosa. Ils ont conçu un modèle 3D du crâne MCP 1694 PV et ont reconstitué la musculature de ses mâchoires. A partir de ce modèle 3D, de Simão-Oliveira et ses collègues ont analysé le comportement biomécanique du crâne de P. nodosa en lui appliquant des contraintes de von Mises. Le crâne MCP 1694 PV étant incomplet, seule la mâchoire inférieure a été soumise à l’analyse de stress biomécanique.

La méthode des contraintes de von Mises permet de connaître les actions optimales au niveau biomécanique, indiquant quels mouvements Proterochampsa était susceptible de faire ou de ne pas faire. de Simão-Oliveira et ses collègues analysé les cas d’une morsure antérieure, d’une morsure médiane et d’une morsure postérieure. Ils ont ensuite comparé les résultats obtenus avec ceux obtenus pour un crâne de faux-gavial (Tomistoma schlegelii) et un crâne d’alligator d’Amérique (Alligator mississippiensis).

de Simão-Oliveira et ses collègues ont estimé que la force d’une morsure antérieure de Proterochampsa était de 435 à 472 N. Pour une morsure médiane, cette force serait d’entre 758 et 822 N. Enfin, la force d’une morsure postérieure de Proterochampsa serait comprise entre 1098 N et 1191 N. Cette force de morsure est proportionnellement similaire à celle d’un alligator moderne et plus élevée que celle du faux-gavial. Proterochampsa mordait donc le plus fort avec l’arrière de sa mâchoire, avec une force allant jusqu’à presque 1200 N. Pour donner un ordre de grandeur, c’est une force légèrement plus faible que la morsure d’un loup actuel.

L’analyse des contraintes de von Mises montre que le stress mécanique subi par la mâchoire inférieure de Proterochampsa était intermédiaire entre celui subi par le faux gavial et l’alligator. Proterochampsa était moins susceptible de mordre efficacement avec le bout de son museau, ni de mordre très fort. Il était toutefois capable de puissantes morsures, avec des risques structurels pour ses mâchoires. Les capacités biomécaniques des mâchoires de Proterochampsa faisaient de lui un prédateur préférant capturer plutôt que mordre avec le bout de son museau. Il préférait ainsi mordre ses proies avec l’arrière de sa mâchoire.

de Simão-Oliveira et ses collègues estiment que Proterochampsa était un prédateur manquant de spécialisations crâniennes. Il compensait ce manque en étant capable de se nourrir d’une grande diversité de proies. Son museau assez allongé lui permettait de capturer de petites proies au corps mou, mais sa morsure postérieure puissante lui permettait aussi de se nourrir de grosses proies. de Simão-Oliveira et ses collègues en concluent que Proterochampsa était un prédateur généraliste pouvant chasser des proies de tailles petite à moyenne.

Références : de Simão-Oliveira, D.; dos Santos, T.; Pinheiro, F.L.; Pretto, F.A., 2024, Assessing the adductor musculature and jaw mechanics of Proterochampsa nodosa (Archosauriformes: Proterochampsidae) through finite element analysis. The Anatomical Record.
de Simao-Oliveira, D.; Pinheiro, F.L.; Andrade, M.B.; Pretto, F.A., 2022, Redescription, taxonomic revaluation and phylogenetic affinities of Proterochampsa nodosa (Archosauriformes: Proterochampsidae) from the Early Late Triassic of the Candelaria sequence (Santa Maria Supersequence). Zoological Journal of the Linnean Society. 196: 1310-1332.
Toutes les images proviennent de de Simão-Oliveira et al., 2024, à l’exception de la première qui provient de de Simão-Oliveira et al., 2022