En 1991, le crâne désarticulé d’un squamate fut découvert sur le site de Dinosaur National Monument, dans le Tithonien de la formation géologique de Morrison (Utah, Etats-Unis). En 1998, Evans et Chure décrivirent ce crâne (DINO 15914) et l’attribuèrent à Paramacellodus cf. P. oweni. Les études suivantes ne remirent pas en cause cette attribution, jusqu’à ce que DINO 15914 fut soumis à un scan CT. Ce scan révéla que ce spécimen représente un nouveau taxon. Meyer et ses collègues décrivent ainsi ce taxon sous le nom d’Helioscopos (« observateur du soleil », en raison de la grande taille de son foramen pinéal), avec H. dickersonae pour espèce.

L’holotype (DINO 15914) d’Helioscopos dickersonae est un crâne partiel désarticulé. Il se compose des maxillaires, des préfrontaux, des pariétaux, des postorbitofrontaux, du squamosal droit, du jugal gauche, des palatins partiels, du ptérygoïde droit, de la boîte crânienne partielle, des dentaires et des postdentaires gauches fusionnés. D’après le degré de fusion des éléments du crâne de DINO 15914, Meyer et ses collègues en déduisent que ce spécimen est un individu adulte.

L’analyse phylogénétique de Meyer et ses collègues a classé Helioscopos comme un membre dérivé d’Ardeosauridae, en taxon-soeur d’Ardeosaurus. Les ardeosauridés y sont classés comme une famille de Pan-Gekkota, proches de Gekkota. Le terme Pan-Gekkota est un nom équivalent au nom de Gekkonomorpha plus fréquemment employé. Helioscopus est ainsi le plus vieux représentant connu de la lignée menant aux geckos.

La dentition d’Helioscopos est typique des ardeosauridés et des autres gekkonomorphes basaux, avec des dents aux sommets monocuspides légèrement recourbés. Elle indique qu’Helioscopos était un invertivore qui se nourrissait de proies assez molles. Les geckos actuels présentent des frontaux avec des processus subolfactifs fusionnés, ce qui leur donne un aspect bombé. Chez Helioscopos, ces processus se rapprochent sans se toucher, montrant ainsi une morphologie de transition, qui aurait donné un aspect légèrement bombé à son toit crânien.

Helioscopos se caractérise par la présence d’un foramen pinéal bien développé, ce qui ne se retrouve pas chez Ardeosaurus mais aussi chez les gekkonomorphes plus dérivés. Ce foramen est l’indicateur de la présence d’un œil pinéal, un organe permettant de détecter la présence de lumière. L’œil pinéal n’est pas présent chez les gekkos actuels car ce sont des animaux nocturnes. Sa présence chez Helioscopos permet à Meyer et ses collègues de supposer qu’il était diurne. En détectant la luminosité de son environnement, Helioscopos a ainsi pu réguler sa production de mélatonine et suivre la durée de la journée, régulant son rythmes circadiens et ses processus physiologiques dépendants de la lumière tels comme la thermorégulation.

Helioscopos était un petit prédateur, chassant probablement des invertébrés au corps mou, et vivant dans un environnement de plaines boisées en compagnie d’une faune particulièrement bien connue. La faune du site où a été découvert l’holotype d’Helioscopos dickersonae comprend d’autres squamates, des crocodylomorphes, des tortues, des ptérosaures, des ornithopodes comme Dryosaurus ou Camptosaurus, l’ankylosaure Mymoorapelta, le stégosaure Stegosaurus, une grande variété de sauropodes ainsi qu’une quantité de théropodes comprenant Ornitholestes, Allosaurus, Ceratosaurus, Coelurus, Torvosaurus…
Références : Meyer, D.; Brownstein, C.D.; Jenkins, K.M.; Gauthier, J.A., 2023, A Morrison stem gekkotan reveals gecko evolution and Jurassic biogeography. Proceedings of the Royal Society B. 290: 20232284.
Evans, S.E.; Chure, D.C., 1998, Paramacellodid lizard skulls from the Jurassic Morrison Formation at Dinosaur national monument, Utah. Journal of Vertebrate Paleontology. 18(1): 99-114.
Toutes les images proviennent de Meyer et al., 2023