Il est possible d’estimer le débit sanguin d’un vertébré fossile en observant les foramens de ses os, des trous sur les os où passent les vaisseaux sanguins. En mesurant la taille des foramens, il est possible d’estimer le débit sanguin qui traverse l’os. En général, les besoins énergétiques des tissus osseux déterminent les débits sanguins vers ces tissus. Ces besoins énergétiques sont directement liés au métabolisme, et l’étude du débit sanguin permet donc d’en savoir plus sur le métabolisme des animaux fossiles. de Araújo Sena et ses collègues ont donc calculé le débit sanguin du fémur de plusieurs notosuchiens, afin de mieux connaître les taux métaboliques de ce groupe de crocodylomorphes.

de Araújo Sena et ses collègues ont analysé les foramens nutritifs des fémurs de 7 genres différents de notosuchiens. Ils ont étudié un fémur (LAPEISA-Pal-0032) d’Araripesuchus sp. (Uruguaysuchidae, terrestre), un fémur (CPPLIP 501) d’Uberabasuchus terrificus (Peirosauridae, semi-aquatique), un fémur (DGM 434-R) d’Itasuchus jesuinoi (Itasuchidae, semi-aquatique), deux fémurs (MCT 1831-R et MCT 1835-R) de Sahitisuchus fluminensis (Sebecidae, terrestre), un fémur (FFP PG 14) de Coronelsuchus civali (Sphagesauria, terrestre), un fémur (CPPLIP 1847) de Campinasuchus dinizi (Baurusuchidae, terrestre) ainsi que deux fémurs (LPRP/USP 0019 et LPRP/USP 0019b) de Pissarrachampsa sera (Baurusuchidae, terrestre).

de Araújo Sena et ses collègues ont ensuite comparé leurs résultats avec les données disponibles pour des animaux actuels. Ils constatent que le débit sanguin du fémur est très proche entre tous les membres de Notosuchia. Aucune différence significative est observée, malgré différentes écologies présentes (terrestre et semi-aquatique). Le débit sanguin du fémur des notosuchiens correspond à un métabolisme ectotherme, ce qui est cohérent avec les résultats des études précédentes. Toutefois, leur taux métabolique est plus élevé que pour les crocodiliens modernes.

Les prédateurs actifs ont des taux métaboliques plus élevés que les prédateurs en embuscade ou fouisseurs. De plus, les proies qui utilisent des moyens de fuite ou de défense active ont des taux métaboliques plus élevés que les proies passives. Avec un taux métabolique plus élevé que les crocodiliens actuels qui sont des chasseurs d’embuscade, de Araújo Sena et ses collègues en déduisent que les notosuchiens étaient des proies et/ou des prédateurs plus actifs. Les notosuchiens étaient donc des chasseurs actifs capables de consommer des niveaux élevés d’oxygène qui amélioraient leur endurance, leur permettant des périodes de course prolongées.
Références : de Araújo Sena, M.V.; Montefeltro, F.C.; Marinho, T.S.; Langer, M.C.; Fachini, T.S.; Piacentini Pinheiro, A.E.; Machado, A.S.; Lopes, R.T.; Pellarin, R.; Sayão, J.M.; Oliveira, G.R.; Cubo, J., 2023, The cost of living in Notosuchia (Crocodyliformes, Mesoeucrocodylia). Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology. 111855.
Godoy, P.L.; Bronzati, M.; Eltink, E.; Marsola, J.C.A.; Cidade, G.M.; Langer, M.C.; Montefeltro, F.C., 2016, Postcranial anatomy of Pissarrachampsa sera (Crocodyliformes, Baurusuchidae) from the Late Cretaceous of Brazil: insights on lifestyle and phylogenetic significance. PeerJ. 4: e2075.
Toutes les images proviennent de de Araújo Sena et al., 2023, à l’exception de la première qui provient de Godoy et al., 2016