Tanystropheus est un genre d’archosauromorphe tanystropheidé courant dans les dépôts du trias moyen d’Eurasie. Il se caractérise notamment par son cou très allongé, formé par l’hyper-allongement de ses 13 vertèbres cervicales. Cette morphologie unique était une adaptation pour chasser en embuscade ses proies. Néanmoins, un cou aussi long est également une faiblesse face aux prédateurs, en ce qu’il est dénué de protections et qu’il contient des organes vitaux. Spiekman et Mujal rapportent ainsi deux cas de décapitation de Tanystropheus, montrant bien que son cou allongé était une faiblesse face aux prédateurs.

Spiekman et Mujal décrivent des traces de morsure et de décapitation sur deux spécimens de Tanystropheus. Il s’agit du spécimen PIMUZ T 2819 de T. hydroides et du spécimen PIMUZ T 3901 de T. langobardicus. PIMUZ T 2819 et PIMUZ T 3901 se composent tous les deux d’un crâne complet et d’une colonne cervicale partielle, et proviennent de l’Anisien de la formation géologique de Besano (Italie). Les deux spécimens sont connus de longue date dans la littérature scientifique : PIMUZ T 3901 a été décrit pour la première fois par Wild, 1980 et PIMUZ T 2819 a été décrit pour la première fois par Wild, 1974.

Spiekman et Mujal constatent que PIMUZ T 2819 présente une cassure nette au niveau de la dernière vertèbre cervicale préservée (la 10ème), et des traces de morsure sur cette vertèbre. Les morsures sont alignées et accompagnent la section brisée du cou, ce qui suggère qu’elles sont les traces de la morsure décapitante. Une trace de morsure n’est pas alignée avec les autres, et indique une morsure antérieure. D’après la forme des morsures, le mouvement des dents s’est fait vers l’arrière par rapport à la vertèbre. Le prédateur a donc, après avoir saisi le cou, tiré vers l’arrière. Le cou de PIMUZ T 2819 a été mordu deux fois par le haut et par l’arrière, la dernière morsure ayant sectionné le cou.

Spiekman et Mujal constatent que PIMUZ T 3901 présente une cassure nette au niveau de la dernière vertèbre cervicale préservée (la 7ème) et des côtes cervicales, et des traces de morsure sur la 5ème vertèbre. La cassure nette de la 7ème vertèbre s’est faite à cause d’une morsure violente. La morsure sur la 5ème vertèbre est accompagnée de cassures au niveau des côtes cervicales correspondantes, suggérant que cette partie du cou a également été mordue. D’après la forme des morsures, le prédateur a attaqué par le haut. Le cou de PIMUZ T 3901 a été mordu deux fois par le haut, une des deux morsures ayant sectionné le cou.

Pour Spiekman et Mujal, les traces de morsures sur PIMUZ T 2819 et PIMUZ T 3901 sont des preuves de décapitation ayant donné la mort aux spécimens, et non de charognage. En effet, on observe seulement des morsures pour sectionner le cou, et non pour se nourrir du cou ou de la tête. Les prédateurs qui ont attaqué ces deux spécimens de Tanystropheus se sont probablement nourris de la partie postérieure du corps, bien plus nutritive que le cou et la tête qui ont été abandonnés.

Références : Spiekman, S.N.F.; Mujal, E., 2023, Decapitation in the long-necked Triassic marine reptile Tanystropheus. Current Biology.
Renesto, S.; Saller, F., 2018, Evidences for a semi aquatic life style in the triassic diapsid reptile Tanystropheus. Rivista Italiana di Paleontologia e Stratigrafia. 124: 23–34.
Wild, R., 1980, Tanystropheus (Reptilia : Squamata) and its importance for stratigraphy. Mémoires de la Société Géologique de France. 139: 201-206.
Wild, R., 1974, Die Triasfauna der Tessiner Kalkalpen XXIII. Tanystropheus longobardicus (Bassani) (neue Ergebnisse). Schweizerische Paläontologische Abhandlungen, Basel. 95: 4-162.
Toutes les images proviennent de Spiekman et Mujal, 2023, à l’exception de la première qui provient de Renesto et Saller, 2018 et de la dernière qui est une œuvre de Roc Olivé