Nouveau nodosauridé : Vectipelta

En 1993, Gavin Leng a découvert des vertèbres d’ankylosaure près de Chilton Chine, dans le Barrémien de la formation géologique de Wessex (Isle of Wight, Angleterre). Les vertèbres ont ensuite reçu le numéro IWCMS 1996.153 et l’année suivante, Lin Spearpoint a découvert le reste du squelette allant avec ces vertèbres, qui a reçu le numéro IWCMS 2021.75. Ce squelette d’ankylosaure a été surnommé « Spearpoint Ankylosaur » dans la littérature scientifique. En 2014, Lomax et Tamura l’ont mentionné comme un spécimen de Polacanthus. Les études suivantes suivirent cette attribution mais sans décrire en détail le squelette. Pond et ses collègues décrivent ainsi le Spearpoint Ankylosaur et en font l’holotype du nouveau genre Vectipelta (« bouclier de l’Ile de Wight »), avec V. barretti pour espèce.

Reconstitution squelettique de Vectipelta, montrant les os connus de l’holotype (IWCMS 1996.153 et IWCMS 2021.75)

L’holotype (IWCMS 1996.153 et IWCMS 2021.75) de Vectipelta barretti est un squelette partiel qui comprend 4 vertèbres cervicales, 16 dorsales, 5 sacrales et 17 caudales, des fragments de côtes dorsales, l’extrémité proximale de la scapula gauche, une extrémité distale de scapula, l’humérus gauche, un ulna partiel, le bassin partiel, une fibula partielle, un métatarsien II droit et de nombreux ostéodermes.

Photographies de plusieurs éléments de l’holotype (IWCMS 1996.153 et IWCMS 2021.75) de Vectipelta barretti

Plusieurs années avant 1993, une boîte crânienne roulée a été collectée au même endroit par David Cooper. En 1996, Norman et Faiers ont référé ce spécimen (CAMSM X.26242) à cf. Polacanthus. Dans les années 1990, David Richards a découvert un fémur partiel (NHMUK PV R16484) et une partie postérieure d’ilium (NHMUK PV R16485) dans la même localité. En 2020, Raven et ses collègues ont référé le fémur à Ankylosauria indet. et l’ilium à Dinosauria indet. Pour Pond et ses collègues, ces spécimens peuvent appartenir au même individu que l’holotype, mais il est impossible d’en être certain.

Dessins interprétatifs de la boîte crânienne CAMSM X.26242, appartenant peut-être au même individu que l’holotype de Vectipelta barretti

Pond et ses collègues n’ont pas effectué d’analyse phylogénétique pour classer Vectipelta, car une étude récente de la phylogénie des ankylosaures avait testé sa position (sous l’appellation « Spearpoint Ankylosaur »). Cette analyse, menée par Raven et ses collègues (voir cet article), a retrouvé Vectipelta dans un petit clade avec Zhejiangosaurus et Dongyangopelta. On note l’absence de relation phylogénétique entre Vectipelta et les autres ankylosaures du crétacé inférieur anglais (Polacanthus et Hylaeosaurus). Néanmoins, la phylogénie de Raven et ses collègues présente des résultats atypiques et selon la phylogénie classique des ankylosaures, Vectipelta se place au sein de Nodosauridae. En l’absence d’une nouvelle analyse phylogénétique, la position de Vectipelta dans cette famille reste floue.

Résultats de l’analyse phylogénétique de Raven et ses collègues, adoptés par Pond et ses collègues, plaçant Vectipelta dans un clade d’ankylosaures intermédiaires avec Zhejiangosaurus et Dongyangopelta

Pond et ses collègues ont réalisé une analyse ostéohistologique du boulier sacré de l’holotype de Vectipelta. Ils ont constaté que comme pour les autres boucliers sacrés des ankylosaures, les fibres de collagène de ce bouclier sont organisées d’une manière particulière. Cette organisation similaire à celle du contre-plaqué, permet d’augmenter la ténacité et empêcher la propagation des microfissures dans l’os en cas de chocs ou de pression. Pond et ses collègues en concluent que, comme cela a déjà été supposé, le bouclier sacré des ankylosaures devait remplir une fonction principalement défensive. Le bouclier sacré de Vectipelta l’aurait protégé des coups donné par ses congénères et des morsures des prédateurs.

Coupe ostéohistologique du bouclier sacral de l’holotype (IWCMS 2021.75) de Vectipelta barretti ; on distingue des ensembles compacts de fibres (C : SF) qui augmentaient la résistance aux chocs

Vectipelta était un ankylosaure de taille moyenne, avec une longueur totale d’environ 5 mètres. Il vivait dans un environnement de plaines inondables côtières, avec un climat similaire à celui de la Méditerranée d’aujourd’hui, avec des saisons arides et humides marquées. Vectipelta cohabitait avec des squamates, des crocodylomorphes, des tortues, des ptérosaures, d’autres ankylosaures, des ornithopodes, des sauropodes, des oiseaux, des coelurosaures basaux, des troodontidés, des dromaeosauridés, des tyrannosauroidés, des spinosauridés et des neovenatoridés.

Reconstitution squelettique de Vectipelta

Références : Pond, S.; Strachan, S.-J.; Raven, T.J.; Simpson, M.I.; Morgan, K.; Maidment, S.C.R., 2023, Vectipelta barretti, a new ankylosaurian dinosaur from the Lower Cretaceous Wessex Formation of the Isle of Wight, UK. Journal of Systematic Palaeontology. 21(1): 2210577.

Lomax, D.R.; Tamura, N., 2014, Dinosaurs of the British Isles. Siri Scientific Press. 

Norman, D.B.; Faiers, T., 1996, On the first partial skull of an ankylosaurian dinosaur from the Lower Cretaceous of the Isle of Wight, southern England. Geological Magazine. 133: 299–310.

Raven, T.J.; Barrett, P.M.; Pond, S.B.; Maidment, S.C.R., 2020, Osteology and taxonomy of British Wealden Supergroup (Berriasian–Aptian) ankylosaurs (Ornithischia, Ankylosauria). Journal of Vertebrate Paleontology. 40: e1826956.

Raven, T.J.; Barrett, P.M.; Joyce, C.B.; Maidment, S.C.R., 2023, The phylogenetic relationships and evolutionary history of the armoured dinosaurs (Ornithischia: Thyreophora). Journal of Systematic Palaeontology. 21: 1, 2205433.

Toutes les images proviennent de Pond et al., 2023 à l’exception de la troisième qui provient de Norman et Faiers, 1996

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