Nouveau matériel de Bennettazhia

En 1928, Gilmore décrivit un humérus et deux vertèbres dorsales comme l’holotype (MPUC V.126713) de la nouvelle espèce Pteranodon oregonensis. Ce spécimen provient de l’Albien de la formation géologique d’Hudspeth (Oregon, USA). Il s’avéra ensuite que P. oregonensis devait recevoir son propre genre, et en 1991, Nesov créa le genre Bennettazhia avec la nouvelle combinaison B. oregonensis. Nesov classa Bennettazhia chez les azhdarchidés, mais en 1994, Bennett le plaça plutôt chez les dsungaripteridés. L’analyse phylogénétique la plus récente, celle d’Andres et al., 2014, classe le genre comme un Tapejaromorpha basal. Des fouilles menées en 2021 ont mis au jour de nouveaux restes de Bennettazhia dans la formation géologique d’Hudspeth. Retallack et ses collègues mentionnent ainsi leur découverte et leur implication pour le classement de Bennettazhia.

Photographie de l’holotype (MPUC V.126713) de Bennettazhia oregonensis par Michael Brett-Surman (à gauche) et reconstitution squelettique de Bennettazhia en tant que Tapejaromorpha basal, par Dean Falk Schnabel, sur la base des éléments de l’holotype (à droite)

Retallack et ses collègues rapportent la découverte d’un lit d’os contenant majoritairement des petits fragments d’ammonites et de bivalves, ainsi que quelques os et dents de vertébrés. Ils mentionnent des dents isolées ainsi qu’une mandibule partielle comme appartenant très probablement à Bennettazhia. Ces dents ainsi que la morphologie très robuste de la mâchoire suggèrent que Bennettazhia était un dsungaripteridé. Retallack et ses collègues n’ont pas effectué de description de ces spécimens, ce qui rend toutefois ces observations provisoires.

Photographie des spécimens référés à Bennettazhia oregonensis par Retallack et ses collègues (A et B- deux dents isolées ; C et D- une mandibule partielle)

Retallack et ses collègues remarquent que les ammonites du site fouillé présentent un taux de fragmentation exceptionnel. Aucun autre site connu ne montre autant d’ammonites détériorées de la sorte. Selon eux, les causes de cette fragmentation ne sont pas taphonomiques, mais plutôt dues à un comportement de prédation. En effet, la forme des fragments de coquilles de mollusques découverts est très similaire à celle des fragments de bivalves que les goélands actuels font chuter sur les rochers et cassent avec leur bec. Pour Retallack et ses collègues, l’abondance de coquilles autant fragmentées est le signe de la présence d’un dépotoir d’un prédateur durophage.

Photographies de plusieurs ammonites fragmentaires, avec une surface très abîmée (A) ou sous forme de débris (B et C) ; Ces ammonites font partie d’un dépotoir laissé par la prédation d’une colonie de Bennettazhia durophages

Avec les nouveaux spécimens découverts, il apparaît que Bennettazhia est un dsungaripteridé, avec des dents et des mâchoires adaptées à la durophagie. Sur la base de l’écologie alimentaire de Dsungaripterus, il semble que Bennettazhia pouvait se nourrit de bivalves, de gastéropodes et des crustacés. Retallack et ses collègues en concluent que l’auteur de ce dépotoir de coquilles de mollusques est le ptérosaure Bennettazhia. Ils notent également que le site fouillé présent une composition anormalement riche en phosphore. Des comparaisons avec des phénomènes actuels les ont poussé à penser qu’il pourrait s’agir de signaux chimiques laissés par du guano. Parmi tous les animaux trouvés sur le site, seul Bennettazhia est un bon candidat pour avoir déposé ce guano. Ces signes d’une présence abondante de ce ptérosaure semblent indiquer que comme les goélands actuels, Bennettazhia vivait en colonies sur les falaises, face à la mer.

Résultats de l’analyse chimique du site de fouilles, qui présente des taux anormalement élevés de phosphate (P2O5) ; Ce taux est anormal suite à la présence d’un dépôt de guano, très probablement par une colonie de Bennettazhia

Bennettazhia était un ptérosaure assez grand, d’une envergure de 3 à 4 mètres. Avec les résultats de Retallack et ses collègues, il apparaît que Bennettazhia était un durophage vivant en colonies sur les côtes. Ces colonies de Bennettazhia laissaient des marques de leur passage avec la présence de dépotoirs contenant des fragments de coquilles, ainsi que des coulées de guano. Bennettazhia vivait en compagnie d’ornithopodes, de plésiosaures et de l’ichthyosaure ophthalmosauridé Platypterygius americanus.

Références : Retallack, G.J.; Carr, G.E.; Broz, A.P., 2023, Early Cretaceous pterosaur guano deposit from central Oregon, USA. Lethaia. 56(1).

Gilmore, C.W., 1928, A new pterosaurian reptile from the marine Cretaceous of Oregon. United States National Museum Proceedings. 73: 1−5.

Nesov, L.A., 1991, Gigantskiye lyetayushchiye yashchyeryi semyeistva Azhdarchidae. I. Morfologiya, sistematika. Vestnik Leningradskogo Universiteta, Seriya 7; Geologiya, Geografiya. 2: 14–23.

Bennett, S.C., 1994, Taxonomy and systematics of the Late Cretaceous pterosaur Pteranodon (Pterosauria, Pterodactyloidea). Occasional Paper Natural History Museum University of Kansas. 169: 1−170.

Andres, B.; Clark, J.; Xu, X., 2014, The earliest pterodactyloid and the origin of the group. Current Biology. 24: 1011–1016.

Toutes les images proviennent de Retallack et al., 2023 à l’exception de la première qui se compose d’une photographie de Michael Brett-Surman et d’une œuvre de Dean Falk Schnabel

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