Le complexe hyolaryngé (constitué de l’os hyoïde, du larynx et de la langue, entre autres) permet l’alimentation, la respiration et la vocalisation chez les tétrapodes. Chez les archosaures, le son de la vocalisation se produit de deux manière différentes. Il est émis par le larynx chez les crocodiliens, mais chez les oiseaux, il est émis par le syrinx et le larynx n’est utilisé qu’en tant que conduit vocal. Le complexe hyolaryngé est rarement fossilisé chez les sauropsides fossiles, car il se compose majoritairement de tissus mous. Yoshida et ses collègues décrivent ainsi le larynx d’un spécimen de l’ankylosaure Pinacosaurus, permettant d’en savoir plus sur la vocalisation des dinosaures.
Yoshida et ses collègues ont examiné le spécimen IGM 100/3186, précédemment étudié en 2015 par Hill et ses collègues. Il s’agit d’un spécimen du Campanien de la formation géologique de Djadokhta (Ömnögovi, Mongolie), référé à Pinacosaurus grangeri. Ils ont constaté que l’identification de plusieurs des os d’IGM100/3186 faite par Hill et ses collègues était erronée. Yoshida et ses collègues ont remarqué la présence de deux éléments du larynx et d’un os hyoïde chez IGM100/3186. A l’issue de leur examen, ils ont remarqué que le complexe hyolaryngé était également en partie présent chez un autre spécimen d’ankylosaure : l’holotype de Saichania (IGM 100/151). Yoshida et ses collègues ont procédé à la modélisation 3D du complexe hyolaryngé de Pinacosaurus. Ils ont également comparé sa morphologie avec celle des autres archosaures dans une analyse morphométrique.
Chez le spécimen IGM 100/3186 de Pinacosaurus et IGM100/151 de Saichania, les zones du larynx préservés sont le cricoïde et l’aryténoïde. Ces cartilages sont ossifiés, comme chez les oiseaux, indiquant que le larynx est ossifié chez certains dinosaures non aviaires. Yoshida et ses collègues font remarquer que l’ossification du larynx peut être typique des ankylosauridés, ou absente chez les autres fossiles en raison d’une mauvaise conservation. En plus d’être ossifié, le larynx de Pinacosaurus présente plusieurs caractéristiques très proches de celles des oiseaux. Pinacosaurus possède les mêmes éléments du complexe hyolaryngé que les crocodiliens actuels, mais un larynx beaucoup plus proche de celui des oiseaux. Yoshida et ses collègues peuvent ainsi reconstruire l’évolution du complexe hyolaryngé chez les sauropsides, avec Pinacosaurus formant la transition entre oiseaux et crocodiliens.
Yoshida et ses collègues ont donc réalisé une analyse morphométrique prenant en compte la taille de la mâchoire inférieure et celle des éléments du larynx. Pinacosaurus possède des aryténoïdes allongés, comme les oiseaux et au contraire des crocodiliens et des squamates. Pinacosaurus présente également un cricoïde très large, comme chez les gekkos, certaines tortues et les oiseaux. Cette analyse morphométrique montre bien que le larynx de Pinacosaurus possède des proportions beaucoup plus proches de celles des oiseaux. Ses dimensions sont un peu plus élevées que la gamme morphospaciale des oiseaux, mais en sont beaucoup plus proches que des autres groupes.
Yoshida et ses collègues constatent que la morphologie de son larynx a permis à Pinacosaurus d’ouvrir la glotte facilement, comme chez les oiseaux. Il a peut être pu l’utiliser pour la régulation du flux d’air à la manière des oiseaux actuels, afin de modifier un son. Un cricoïde de grande taille est typique des groupes qui vocalisent, ce qui suggère que le larynx de Pinacosaurus était adapté à vocaliser activement. Pinacosaurus a même pu produire des cris puissants mais aussi complexes, comme les gekkos ou les oiseaux. Selon Yoshida et ses collègues, sa vocalisation pourrait être liée à la parade nuptiale, à l’appel parental, à l’intimidation des prédateurs… Pinacosaurus possédait probablement une source vocale non laryngée, produisant des sons complexes comme les oiseaux modernes, mais dont la source vocale reste inconnue.
Référence : Yoshida, J.; Kobayashi, Y.; Norell, M.A., 2023, An ankylosaur larynx provides insights for bird-like vocalization in non-avian dinosaurs. Communications Biology. 6: 152.
Toutes les images proviennent de Yoshida et al., 2023
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