Nouveau ptérosaure : Balaenognathus

En 2011, lors d’une campagne de fouilles près du village de Wattendorf, le squelette bien préservé d’un ptérosaure fut découvert. Les sédiments fouillés datent du Kimméridgien et proviennent de la formation géologique de Torleite (Bayern, Allemagne). Martill et ses collègues décrivent ainsi ce spécimen sous le nom de Balaenognathus (« mâchoire de baleine ») avec B. maeuseri pour espèce.

Photographie et dessin interprétatif de l’holotype (NKMB P2011-633) de Balaenognathus maeuseri

L’holotype (NKMB P2011-633) de Balaenognathus maeuseri se compose d’un squelette articulé presque complet, auquel il ne manque qu’un morceau de l’ilium gauche et une partie de l’aile gauche. Malheureusement, le spécimen est écrasé et une grande partie des os se trouve être en deux dimensions. L’analyse taphonomique du spécimen menée par Martill et ses collègues révèle qu’à sa mort, NKMB P2011-633 a vu sa cage thoracique gonfler sous la pression des gaz de décomposition, ce qui a causé la dislocation des côtes et des os du torse.

Reconstitution squelettique du crâne de Balaenognathus maeuseri

Martill et ses collègues notent la présence d’une petite zone, au niveau des phalanges manuelles gauches I et II, et d’une autre au niveau de l’ulna gauche, où des tissus mous sont préservés. La présence d’aktinofibriles dans ces zones suggère qu’il s’agit de fragments de la membrane du brachiopatagium, l’une des membranes alaires de Balaenognathus.

Photographies et dessin interprétatif des tissus mous de l’holotype (NKMB P2011-633) de Balaenognathus maeuseri

L’analyse phylogénétique réalisée par Martill et ses collègues a classé Balaenognathus au sein des ctenochasmatidés. Toutefois, leur analyse ne résout pas bien les relations entre les différents membres de ce clade, avec une polytomie formée par des genres pourtant bien connus. Balaenognathus y est classé comme le taxon-soeur d’un clade contenant AurorazhdarchoGladocephaloideusFeilongusMoganopterus et Lonchodectes. Balaenognathus semble donc être un ctenochasmatidé dérivé mais son classement précis reste à déterminer.

Résultats de l’analyse phylogénétique de Martill et ses collègues, classant Balaenognathus au sein des ctenochasmatidés

La proportion des os des membres antérieurs de Balaenognathus est unique et particulière. En effet, son doigt IV est proportionnellement plus long que celui de la plupart des ctenochasmatidés. Une autre particularité de Balaenognathus est l’absence de ptéroïdes sur l’holotype. Cet os, unique aux ptérosaures et permettant de soutenir une partie de la membrane alaire, n’est pas conservé malgré l’état complet de l’holotype. Martill et ses collègues supposent que chez l’holotype, les ptéroïdes n’étaient pas ossifiés, ce qui serait unique au sein de tout Pterosauria.

Diagramme présentant la taille proportionnelle des os des membres antérieurs de plusieurs ctenochasmatidés, dont Balaenognathus

Balaenognathus présente une morphologie crânienne unique, avec des mâchoires en spatule et une dentition très fine, allongée, avec certaines dents en forme de crochets. Ses dents étaient très nombreuses (au moins 480) et resserrées les unes contre les autres. L’extrémité antérieure de ses mâchoires est édentée et le tiers antérieur du museau était en permanence ouvert du fait de l’angle formé par les mâchoires (la mâchoire supérieure est plus incurvée que la mâchoire inférieure). Une telle morphologie suggère que Balaenognathus était un ptérosaure filtreur, comme la plupart des ctenochasmatidés, mais au mécanisme de filtrage unique.

Reconstitution du crâne de Balaenognathus, montrant les détails de la morphologie de son museau

Selon Martill et ses collègues, Balaenognathus se nourrissait de microorganismes en les filtrant dans une eau peu profonde. L’eau entrait par la partie avant, édentée, de son museau en entonnoir. Le flux de l’eau était ensuite divisée en deux par le palais, avant d’arriver dans la gorge de Balaenognathus. Ensuite, l’animal expulsait l’eau par la partie postérieure de sa mâchoire, qui comportait des dents plus espacées permettant le passage de l’eau. Un angle d’inclinaison de la tête de 30° est nécessaire à la viabilité de ce mode d’alimentation. Martill et ses collègues ont déterminé que Balaenognathus filtrait l’eau en la pompant par un mécanisme gulaire d’aspiration, soit en la laissant entrer passivement en restant en suspension dans l’eau.

Détail du mode d’alimentation de Balaenognathus, avec une reconstitution de son crâne vu du dessus, mettant en évidence la partie antérieure édentée de son museau

Balaenognathus était un ptérosaure avec une envergure d’environ 1,2 mètre, se nourrissant de zooplancton en eau peu profonde. Il vivait dans un environnement insulaire, bordé d’une mer peu profonde, en compagnie de tortues, de crocodylomorphes, de rhynchocéphales, du ptérosaure Pterodactylus et du megalosauridé Sciurumimus.

Reconstitution du vivant de Balaenognathus par Megan Jacobs

Référence : Martill, D.M.; Frey, E.; Tischlinger, H.; Mäuser, M.; Rivera-Sylva, H.E.; Vidovic, S.U., 2023, A new pterodactyloid pterosaur with a unique filter-feeding apparatus from the Late Jurassic of Germany. PalZ.

Toutes les images proviennent de Martill et al., 2023 à l’exception de la dernière qui est une œuvre de Megan Jacobs

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