Entre 1968 et 1970, une expédition paléontologique a découvert des restes de squamates sur le site de Como Bluff, dans le Tithonien de la formation géologique de Morrison (Wyoming, USA). En 1980, Prothero et Estes mentionnent la découverte d’un maxillaire partiel et l’identifient provisoirement comme Paramacellodus sp. Il s’avère que ce maxillaire fait partie d’un crâne partiel en l’attente d’une étude détaillée. Brownstein et ses collègues décrivent ainsi ce crâne comme l’holotype (YPM VP 4718) du nouveau genre Microteras (« petite merveille ») et son espèce M. borealis.

L’holotype (YPM VP 4718) de Microteras borealis est constitué d’un crâne partiel composé d’un maxillaire, d’une boîte crânienne et de fragments crâniens. Selon Brownstein et ses collègues, ce spécimen appartient à un individu squelettiquement mature. Pour pouvoir l’analyser en détail, ils ont passé le spécimen au scanner CT, donnant ainsi accès à un modèle 3D du fossile.

Les analyses phylogénétiques de Brownstein et ses collègues ont classé Microteras dans une position non résolue à la base de Pan-Scincoidea. La description de Microteras ainsi que d’Eoscincus (traitée dans cet article) a permis à Brownstein et ses collègues de soutenir la monophylie de Scincomorpha mais aussi d’ériger le nouveau clade Pan-Scincoidea. Pan-Scincoidea est ainsi un clade total pour comprendre tous les taxons basaux au sein de Scincoidea en plus de Scincoidea.

L’excellent état de conservation de la boîte crânienne de l’holotype (YPM VP 4718) de Microteras borealis a permis à Brownstein et ses collègues de réaliser un scan CT de son endocrâne. L’oreille interne de Microteras a ainsi pu être analysée, montrant qu’elle est particulièrement similaire à celles des squamates fouisseurs actuels. Cette similitude peut laisser penser que Microteras était également un squamate fouisseur mais Brownstein et ses collègues n’ont pas émis d’hypothèses à ce sujet.

Parmi les lepidosaures, on observe une majorité écrasante de spécimens de sphenodontiens par rapport à ceux des squamates au trias et au jurassique, ces derniers n’étant plus nombreux qu’à partir du crétacé. La présence de Microteras dans des sédiments du jurassique, en tant que squamate assez dérivé, permet de constater que malgré une domination faunique des sphenodontiens, les squamates étaient tout de même en plein développement dès cette époque.

Les dents de Microteras présentent la particularité d’être spatulées et tricuspides. C’était probablement un petit prédateur d’invertébrés spécialisé, mais des analyses plus poussées sur le sujet doivent être faites. Microteras vivait dans un environnement de plaines inondables en compagnie d’une faune particulièrement bien connue. La faune du site de Como Bluff comprend notamment d’autres squamates, des crocodylomorphes, des tortues, des ptérosaures, des ornithopodes comme Dryosaurus ou Camptosaurus, de nombreux stégosaures et sauropodes ainsi qu’une quantité de théropodes comprenant Ornitholestes, Allosaurus, Ceratosaurus, Coelurus, Torvosaurus et Hesperornithoides.
Références : Brownstein, C.D.; Meyer, D.L.; Fabbri, M.; Bhullar, B.-A.S.; Gauthier, J.A., 2022, Evolutionary origins of the prolonged extant squamate radiation. Nature Communications. 13: 7087.
Prothero, D.R.; Estes, R., 1980, Late Jurassic lizards from Como Bluff, Wyoming and their palaeobiogeographic significance. Nature. 286(5772): 484-486.
Toutes les images proviennent de Brownstein et al., 2022 à l’exception de la première qui est composée d’une photographie du Yale Peabody Museum of Natural History et d’un dessin interprétatif provenant de Prothero et Estes, 1980
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