Massospondylus est un sauropodomorphe massospondylidé du jurassique inférieur connu de nombreux spécimens d’Afrique du Sud, du Lesotho et du Zimbabwe. Au vu de sa position phylogénétique et de son abondance, connaitre en détail Massospondylus nous permet d’en savoir plus sur l’évolution des sauropodomorphes. L’ostéohistologie de Massospondylus a déjà été analysée mais partiellement et de nouveaux spécimens récemment décrits permettent à Chapelle et ses collègues d’analyser en détail l’ostéohistologie du genre. Ils ont étudié un échantillon de 27 spécimens d’âges, de taille et de schémas de croissance différents.

Massospondylus présente une grande plasticité de croissance (le schéma de croissance varie beaucoup entre les individus), comme déjà révélé par Chapelle et al. (2021). L’analyse de Chapelle et ses collègues permet de savoir que Massospondylus pouvait atteindre sa maturité squelettique vers 20 ans, mais leurs modèles théoriques établissent un âge minimum de 8 ans et un âge maximum de 81 ans pour atteindre cette maturité, un fait lié à la plasticité de sa croissance. L’âge de la maturité sexuelle a quand à lui été impossible à déterminer. Sa croissance, déjà étudiée, était cyclique et assez rapide. Aucune variation de croissance particulière n’est constatée au cours de l’ontogénèse et la croissance de Massospondylus devait ainsi être constante. L’échantillon étudié comporte une majorité d’individus matures avec une sous-représentation des juvéniles et des vieux individus, peut-être liée à un taux de mortalité élevé chez les jeunes adultes.

L’absence d’os médullaire (tissu osseux produit par les théropodes femelles gravides) chez les individus étudiés de Massospondylus a été relevée par Chapelle et ses collègues. Supposant qu’il est impossible que celui-ci ne contienne que des mâles, il est beaucoup plus probable qu’aucune des femelles de l’échantillon n’aie été gravide ou sexuellement mature ou bien que Massospondylus n’aie pas produit d’os médullaire. Cette dernière hypothèse est privilégiée par Chapelle et ses collègues car aucune trace de ce tissu osseux n’a été relevée parmi les nombreuses analyses ostéologiques de sauropodomorphes.

En 2005, Reisz et ses collègues proposent que Massospondylus a subi un changement de locomotion au cours de l’ontogénèse, éclosant quadrupède et adoptant la bipédie plus tard dans son développement. Cette étude se basait sur un taux de croissance des membres antérieurs différent de celui des membres postérieurs au cours de la croissance. L’analyse de Chapelle et ses collègues met en évidence une falsification des données utilisées pour prouver cette hypothèse, due à la plasticité de croissance de Massospondylus. En réalité, les taux de croissance des membres antérieurs et postérieurs ne varient pas au cours de l’ontogénèse, ce qui a pour conséquence d’invalider l’hypothèse de Reisz et ses collègues. Ainsi Massospondylus ne changeait pas de posture au cours de l’ontogénèse et était bipède depuis l’éclosion, en tout cas cette affirmation reste valide en l’absence de nouveaux arguments en faveur de l’hypothèse de changement de posture.
Références : Chapelle, K.E.; Barrett, P.M.; Choiniere, J.N.; Botha, J., 2022, Interelemental osteohistological variation in Massospondylus carinatus and its implications for locomotion. PeerJ. 10: e13918.
Chapelle, K.E.; Botha, J.; Choiniere, J.N., 2021, Extreme growth plasticity in the early branching sauropodomorph Massospondylus carinatus. Biology Letters. 17(5): 20200843.
Reisz, R.R.; Scott, D.; Sues, H.-D.; Evans, D.C.; Raath, M.A., 2005, Embryos of an Early Jurassic prosauropod dinosaur and their evolutionary significance. Science. 309(5735): 761-764.
Toutes les images proviennent de Chapelle et al., 2022 à l’exception de de la dernière qui est une œuvre de Scott Hartman