Il existe deux hypothèses majeures sur la diversité des dinosaures à la toute fin du crétacé : l’une basée sur des techniques analytiques sur les données fossiles déclare qu’aucun déclin n’est observable avant leur extinction. La seconde stipule qu’on observe un déclin de la diversité sur des centaines de milliers, voire des dizaines de millions d’années, lié à divers facteurs abiotiques et biotiques. Cela suggère également que le déclin à long terme de la diversité des dinosaures a réduit leur capacité à s’adapter groupe à s’adapter à des changements environnementaux radicaux au cours du dernier Crétacé, et qu’en conséquence, ils n’ont pas été en mesure de s’adapter à des changements environnementaux drastiques au cours du Crétacé terminal, et qu’ils n’ont donc pas été en mesure de réagir suffisamment pour se remettre des perturbations causées par l’impact de l’astéroïde.

Pouvoir déterminer quelle hypothèse est valide implique de connaître les archives fossiles suffisamment bien pour pouvoir les analyser. Seules les archives fossiles de la plaine côtière intérieure de l’Amérique du Nord sont assez bien renseignées mais cet écosystème peut ne pas être représentatif de la diversité globale. Pour aborder ces questions à l’échelle mondiale, il est nécessaire de disposer d’un grand nombre d’enregistrements de la même période en dehors de l’Amérique du Nord. C’est pour tenter d’apporter de nouvelles données sur la diversité des dinosaures hors de l’Amérique du Nord que Han et ses collègues ont réalisé une étude sur les archives fossiles du Maastrichtien supérieur de la formation géologique de Shanyang (Shaanxi, Chine).

Le bassin de Shanyang correspond à une zone inondable protégée par un pan de falaise, avec des systèmes de lacs, de méandres ou de rivières tressées en fonction de l’époque. Ces conditions environnementales offrent un cadre idéal à la fossilisation. Pour établir un cadre géochronologique du site, des études magnétostratigraphiques, cyclostratigraphiques et biostratigraphiques ont été réalisées par Han et ses collègues. Ils ont étudié une grande quantité de coquilles d’œufs de dinosaures associées à de nombreux restes d’os de sauropodes, ornithopodes et théropodes retrouvés dans Maastrichtien supérieur (68 à 66 MA) du bassin de Shanyang.

Les œufs retrouvés appartiennent à des hadrosaures et à des oviraptorosaures. Han et ses collègues remarquent que l’occurrence de fossiles d’œufs diminue au fil du temps, par un biais biologique plutôt que taphonomique au vu des conditions de dépôt idéales. Les dinosaures de la formation géologique de Shanyang comprennent : des sauropodes (Qinlingosaurus), des hadrosaures (Shantungosaurus), des oviraptorosaures (Shanyangosaurus) et des tyrannosauridés. Cette composition faunique traduit un déclin de plusieurs groupes de théropodes puisque les troodontidés, les alvarezsauridés, les dromaeosauridés et les tyrannosauridés sont pas ou beaucoup moins représentés qu’au Campanien supérieur-Maastrichtien inférieur. Les hadrosaures observent quand à eux un déclin beaucoup plus lent. Cette question de déclin des théropodes durant le Maastrichtien s’observe à l’échelle mondiale d’après Han et ses collègues mais selon d’autres études la diversité des dinosaures ne baisse pas durant cette période. Cela peut s’expliquer par les méthodes d’analyses diverses utilisées, les biais d’échantillonnage ou encore la datation des fossiles.

Han et ses collègues concluent qu’au Maastrichtien supérieur, les dinosaures dominants étaient les hadrosaures et les oviraptorosaures, de par leur régime herbivore facilement modulable évolutivement. En revanche, un groupe particulier a subi les différents changements climatiques du Maastrichtien supérieur : les ankylosaures (grands absents du bassin de Shanyang). Leur déclin a pu affecter une grande partie de la chaîne alimentaire et donc les théropodes carnivores. Ainsi une approche plus globalisée de la diversité des dinosaures, sortie du contexte nord-américain, permet de mettre en lumière un déclin des dinosaures juste avant leur extinction.
Référence : Han, F.; Wang, Q.; Wang, H.; Zhu, X.; Zhou, X.; Wang, Z.; Fang, K.; Stidham, T.A.; Wang, W.; Wang, X.; Li, X.; Qin, H.; Fan, L.; Wen, C.; Luo, J.; Pan, Y.; Deng, C., 2022, Low dinosaur biodiversity in central China 2 million years prior to the end-Cretaceous mass extinction. Proceedings of the National Academy of Sciences. 119(39): e2211234119
Toutes les images proviennent de Han et al., 2022