On observe de nombreuses traces de lésions sur les mâchoire fossiles des tyrannosauridés, et celles présentes sur l’emblématique spécimen FMNH PR2081 (« Sue ») de Tyrannosaurus rex ont fait l’objet de plusieurs études. En 2001, Riga et Brochu les attribuent comme les signes d’une infection par la bactérie Actinomyces. En 2009, Wolff et ses collègues les ont plutôt identifiées comme une pathologie causée par une infection du protozoaire Trichonomas, qui affecte également les oiseaux modernes principalement quand ceux-ci se nourrissent de charognes ou d’eaux infectées. Dans le but de réexaminer cette hypothèse, Rothschild et ses collègues ont employé une méthode utilisée auparavant pour analyser la cicatrisation des trépanations humaines.

Les pathologies mandibulaires de Sue présentent pas de signes d’infection de la plaie et montrent des signes de cicatrisation au moins un an avant la mort de l’individu et les pathologies attribuées à des infections sur le squelette postcrânien du spécimen correspondent en fait à des signes de cicatrisations non infectieuses. Rothschild et ses collègues rejettent l’hypothèse de Rega et Brochu car les pathologies causées par Actinomyces sont bien différentes de celles observées sur Sue et que ce type d’infection n’a jamais été documenté chez les archosaures. Ils rejettent celle de Wolff et ses collègues car les infections de Trichonomas allant jusqu’à l’os sont très rare alors que des pathologies mandibulaires chez les tyrannosauridés sont assez courantes (15 %). De plus, ces infections ne causent pas de réactions osseuses contrairement aux cas pathologiques des tyrannosauridés comme Sue. La théorie d’une infection par Trichonomas était un argument fort en faveur d’une alimentation par charognage chez Tyrannosaurus et son rejet fragilise également cette hypothèse.

Les observations de Rothschild et ses collègues montrent que les pathologies mandibulaires de Sue et des tyrannosauridés en général ne sont pas dues à des infections bactériennes ou protozoaires. Les tyrannosauridés étant des théropodes présentant des signes fossiles de combats intraspécifiques et en particulier sur le crâne, ils proposent des marques de morsures et de griffures comme interprétation de ces pathologies, sur la base de la forme et de l’organisation des blessures. Ces marques peuvent être liées à l’accouplement, un comportement homosexuel, des affrontements ou encore des jeux. Toutefois cette interprétation soulève des questionnements car l’emplacement de ces morsures est localisé à une seule région de la mâchoire et il manque des traces d’autres dents/griffes pour correspondre à une mâchoire. Ainsi ces pathologies conservent une part de mystère qui reste à élucider.
Références : Rothschild, B.; O’Connor, J.; Lozado, M.C., 2022, Closer examination does not support infection as cause for enigmatic Tyrannosaurus rex mandibular pathologies. Cretaceous Research. 105353
Riga, E.A.; Brochu, C., 2001, Paleopathology of mature Tyrannosaurus rex. Journal of Vertebrate Paleontology. 21(Suppl 3): 92A.
Wolff, E.D.; Salisbury, S.W.; Horner, J.R.; Varricchio, D.J., 2009, Common avian infection plagued the tyrant dinosaurs. PLoS ONE. 4(9): e7288.
Toutes les images proviennent de Rothschild et al., 2022 à l’exception de la première qui provient de Wolff et al., 2009